Un généraliste du Pas-de-Calais : « Je n’ai prescrit du Mediator qu’à des obèses en rapport avec un trouble glycémique. Je comprends cependant que des confrères l’aient prescrit hors AMM : ils subissent la pression des patients qui sont très demandeurs. Pour ma part, je ne prescris jamais hors AMM. Si une AMM existe, c’est qu’une étude a été faite. D’une façon générale, je ne m’estime pas suffisamment informé des risques liés aux médicaments. C’est un gros problème. Il faudrait qu’on soit informé des effets secondaires graves des médicaments sans qu’aucun financement de l’industrie n’intervienne. Aujourd’hui, si on ne fait pas une recherche personnelle, on n’est pas informé. Il faut revoir toute la chaîne de surveillance du médicament. Ce n’est pas normal qu’on ait laissé passer ça. »
Une généraliste des Ardennes : « Que cette affaire soit arrivée au su et au vu de tout le monde est lamentable. Je n’ai jamais, au grand jamais, prescrit du Mediator comme coupe-faim. Je suis stupéfaite que tant de confrères l’aient prescrit hors AMM, et qu’ils ne soient pas plus inquiétés que cela. Comment se fait-il qu’il n’y ait pas plus de coups de bâton ? Une telle affaire, de toute façon, n’aurait jamais dû arriver. Si seulement on faisait notre travail correctement, au lieu de prescrire en dépit du bon sens. Si on n’avait pas mis des céphalosporines de 3e génération sur des rhumes pour des PDG qui prennent l’avion le lendemain, on n’en serait pas là. Cela ne m’arrive quasiment jamais de prescrire hors AMM ; et si je le fais, ce n’est jamais remboursé. On prescrit n’importe comment, et après, badaboum. Faut-il mettre un gendarme derrière chaque médecin, je ne sais pas. Le renforcement des contrôles n’est pas la solution. C’est à chaque médecin de faire son travail correctement. »
Une cardiologue du Rhône : « L’affaire Mediator ne me surprend pas. D’une façon générale, ce ne devrait pas être aux laboratoires ne renseigner les médecins sur les effets secondaires des médicaments. Hélas, même dans un congrès, on n’a jamais la preuve que tel pharmacologue ne travaille pas pour tel laboratoire. Je suis allée au congrès de cardiologie la semaine dernière avec méfiance. Entre confrères, on parle énormément de cette affaire. On ne comprend pas qu’elle ait été couverte à haut niveau. »
Un cardiologue du Finistère : « Jusqu’à présent, je n’avais pas de raison de mettre en doute la sincérité des autorités. L’affaire du Mediator modifie mon regard sur la chaîne de la pharmacovigilance car on s’aperçoit qu’il n’y a pas que l’intérêt scientifique qui prime. Des informations peuvent être masquées. Ça laisse perplexe car jusqu’à présent je faisais confiance à l’AFSSAPS. Ça instille le doute. J’étais au congrès de cardiologie à Paris la semaine dernière, il a beaucoup été question du Mediator. Une mise au point a été faite, la salle était archi-comble. Si les autorités se trompent lorsqu’elles délivrent une AMM, nous n’avons pas les moyens, au niveau d’un cabinet médical, de le voir. Il faut rétablir la confiance, d’autant que l’affaire risque de discréditer des médicaments réellement efficaces. Attention aux amalgames. À part la camomille ou la Jouvence de l’Abbé Soury, je ne connais pas un médicament inoffensif. »
Une cardiologue des Hauts-de-Seine : « Cette affaire est très déstabilisante. Cela nous conforte dans nos doutes. Les cardiologues sont très surpris qu’un nouvel anticoagulant ait obtenu une recommandation européenne de niveau 1 alors qu’il y a très peu de recul. Surpris aussi qu’un nouvel antiarythmique, sur le marché depuis quatre mois, fasse déjà l’objet d’une alerte majeure concernant le bilan hépatique. On se demande s’il n’y a pas conflit d’intérêt. Je ne prescris jamais hors AMM, mais j’en viens à douter de certains médicaments. Quand mes patients me répètent que les palpitations reviennent sous générique, je m’interroge. Je continue à prescrire des génériques, mais avec un doute. Il y a des médicaments que j’évite. J’attends au moins un an de prescription de recul avant de prescrire une nouvelle molécule. »
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation