LE QUOTIDIEN - A lire votre bilan, l’industrie du médicament ne s’est jamais portée aussi mal ?
CHRISTIAN LAJOUX - On peut dire qu’en 2011 il y a eu des signaux et des décisions très contradictoires qui ont affaibli l’industrie du médicament. La loi de financement de la Sécurité sociale 2012, votée en 2011, a augmenté de 500 millions d’euros notre contribution à la résorption du déficit de l’assurance-maladie, et a fait passer notre niveau de taxations spécifiques de 3,3 à 4 %. Ce sont des signaux extrêmement négatifs auxquels il faut ajouter une stigmatisation et un procès permanents. On sait maintenant ce qu’il ne faut pas faire. Cela dit, notons que les nouveaux dirigeants du pays ont exprimé la volonté de prendre les mesures qui permettront de ne pas gâcher nos atouts.
Que faire pour retrouver le chemin de la croissance ?
D’abord retrouver le chemin du dialogue et de la concertation. Il faut que la politique conventionnelle retrouve la dynamique qu’elle a connue il y a quelques années. Je fais confiance à Gilles Johanet, le président du CEPS (chargé de fixer le prix des médicaments, NDLR), pour rétablir ce niveau de confiance et cette qualité du dialogue. Mais il doit faire la synthèse entre des administrations et des ministères qui n’ont pas nécessairement les mêmes enjeux ni les mêmes intérêts. J’en appelle aux pouvoirs publics pour qu’ils conduisent une politique de régulation cohérente avec la politique industrielle de recherche et de production.
Ce qui dérange l’industrie du médicament, c’est le manque de visibilité ?
Il y a le manque de visibilité, mais aussi des décisions opportunistes et le problème de l’accès à l’innovation. Ce dernier point dérange certes l’industrie du médicament, mais aussi, et de plus en plus, les patients. L’innovation rencontre aujourd’hui un problème d’accès au marché, du fait du CEPS qui nous refuse souvent le prix européen, même le plus bas. Pas uniquement pour des médicaments à faible ASMR, mais aussi pour des produits qui ont une ASMR importante.
Quels sont vos motifs d’espoir ?
Pendant la campagne électorale, le nouveau pouvoir a manifesté sa volonté de poursuivre la politique conventionnelle. Ce qui compte, c’est d’avoir un projet partagé avec l’État sur ces questions. Ce gouvernement ne cesse de rappeler que la réindustrialisation de la France passe par l’innovation, et nous aussi ! Il affiche sa volonté de maintenir la compétitivité industrielle de la France. C’est un point auquel nous sommes très sensibles. Sur ces bases, on doit pouvoir mettre en œuvre une politique qui permette à la France de rester un grand pays du médicament.
N’avez-vous pas peur que ces intentions se fracassent sur la réalité des déficits ?
Bien sûr que si. Face à des déficits très importants, je crains une politique opportuniste qui pourrait mettre à mal une stratégie sur le moyen terme. Cela satisferait peut-être des attentes budgétaires de l’assurance-maladie, mais cela fragiliserait encore plus notre secteur. Cela nous ferait perdre encore plus d’emplois, et nous confronterait à des fermetures de sites. Il faut trouver le moyen d’être cohérent entre la volonté d’une politique industrielle de santé et la nécessité d’une régulation que nous ne réfutons pas.
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