› DE NOTRE CORRESPONDANTE
LES OBÉDIENCES maçonniques ont été auditionnées pour la préparation de la loi Leonetti sur la fin de vie ainsi que pour la révision de la loi de bioéthique de 2011. Sur ces deux problématiques, thèmes du colloque lillois, les francs-maçons ont rappelé leur priorité donnée à la condition humaine. « Les progrès de la science peuvent susciter des résistances liées à la peur. Mais avoir peur du progrès risque d’amener les personnes à s’arrêter sur la route, analyse Denise Oberlin, maîtresse de la grande Loge Féminine de France. Il faut cependant réfléchir à tous les bouleversements qui découlent des nouvelles techniques issues de la recherche médicale. Le progrès de plus en plus rapide et médiatisé tend à rétrécir le temps de la réflexion ... D’où l’importance de l’éthique qui amène les hommes à constamment s’interroger. » Un constat s’impose : le questionnement éthique est tributaire de l’avancée de chaque société, et les limites imposées par l’une ne seront pas celles du pays voisin. « En matière de dons d’organes, par exemple, la France n’est pas prête à accepter des prélèvements sur un patient mort par arrêt du cœur après arrêt des thérapeutiques, alors que cela se pratique dans d’autres pays, souligne Philippe Wolf, président du département universitaire et hospitalier d’éthique à Strasbourg. De même pour le don de rein, la France ne compte que 10 % de donneurs vivants contre 50 % dans les pays scandinaves, tant elle a érigé de freins éthiques. Aux États-Unis, le don d’organes est considéré comme un geste de "bon samaritain" et donc beaucoup pus encouragé. » Autant d’exemples qui soulignent la relativité de la notion d’éthique, en fonction de l’environnement sociétal.
Recherche de compromis.
Invité comme grand témoin, Jean-Pierre Denis, directeur de la rédaction de La Vie, constate que la France est constamment à la recherche de compromis sociaux. « Pour la recherche sur l’embryon, par exemple, deux conceptions s’opposent : l’une en faveur d’une interdiction totale, l’autre pour une autorisation totale. Entre les deux se positionnent les partisans d’une autorisation encadrée, et les partisans d’une interdiction avec dérogations, deux positions sensiblement les mêmes. Ce qui est en jeu, c’est la symbolique. La question qui se pose est : veut-on maintenir ou non des interdictions symboliques ? Les opposants à toute régulation des pratiques invoquent les droits de l’individu. Mais l’individu a-t-il droit à tous les droits ? »
Les chercheurs, eux, se disent demandeurs de régulation. « C’est un dommage aussi grave pour la science d’avoir un lobby conservateur que d’avoir des collègues qui font n’importe quoi et utilisent les progrès scientifiques pour faire des choses inutiles, assure Sébastien Duprat, chercheur à l’I-Stem, institut pour le traitement des cellules souches et l’étude des maladies monogéniques. Nous sommes partisans d’un encadrement, mais sans apporter trop de limites préjudiciables à la recherche appliquée. Pour les patients souffrant de maladies rares, le retard pris dans la recherche est très pénalisant. La société doit prendre en compte leur souffrance. » Entre la volonté d’éviter les dérives et la frilosité face au progrès scientifiques, la marge est ténue.
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