Drame de Port-Royal : la mère du bébé mort dénonce le rapport qui blanchit la maternité

Publié le 19/03/2013

La maternité de Cochin-Port- Royal a été blanchie par une enquête interne « exceptionnelle » diligentée à la suite de la perte de son bébé par une patiente qui avait été renvoyée chez elle, a annoncé lundi soir l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP).

Les faits s'étaient produits au début de l'année. Les 29 et 31 janvier, la parturiente était venue pour un examen médical et un déclenchement d'accouchement mais le personnel de la maternité avait considéré que c'était trop tôt et qu'il n'y avait pas de risque. Elle s'était présentée de nouveau dans la nuit du 31 janvier au 1er février mais avec un foetus mort in utero. L'établissement avait alors été mis en cause pour ses capacités d'accueil.

Selon le communiqué de l'AP-HP, les capacités d'accueil de la maternité étaient suffisantes et il n'y a pas eu d'erreur médicale. Néanmoins la mission d'enquête a préconisé d'améliorer l'accueil et la prise en charge des patientes, et une enquête judiciaire est toujours en cours. 

La mère du bébé mort in utero a dénoncé les conclusions de cette enquête, ce mardi matin. Interrogée sur Europe 1, elle a maintenu sa version des faits et mis en cause le personnel de l'hôpital. « Ils essayent de noyer le poisson comme ils peuvent. […] J'ai trouvé qu'il y avait plein d'erreurs dans ce rapport », explique Deborah au micro de la radio. « Ils disent qu'il y avait de la place alors que nous avons le dossier sous les yeux et il y a marqué deux fois de suite 'pas de place ce jour' puis 'pas de place. Reporté. Retour à domicile' », assure-t-elle.

Y-a-t-il eu erreur médicale ? La jeune femme attend les résultats des enquêtes en cours, mais elle évoque une erreur humaine, pointant du doigt une sage-femme de l'hôpital ainsi que le médecin de garde.


"Mon bébé bougeait de moins en moins" par Europe1fr

Pas de risque foetal identifiable selon l'AP-HP

« Les résultats de cette enquête confirment les premiers éléments d’analyse : les personnels soignants, médicaux et paramédicaux, étaient au complet et la disponibilité des lits et des salles permettait de recevoir les urgences », indique pour sa part l'AP-HP qui avait déjà mené une enquête préliminaire après le drame.

L'enquête qui a été menée par une mission médicale de plusieurs spécialistes, dirigée par le professeur Bruno Carbonne, président de la collégiale des gynécologues-obstétriciens de l'AP-HP, exclut aussi toute erreur médicale. « La prise en charge médicale a été conforme aux bonnes pratiques obstétricales telles que définies par les recommandations de la HAS (Haute autorité de santé): le déclenchement de l'accouchement, tel qu'il avait été planifié, n'a, à aucun moment, présenté un caractère urgent, en l’absence de risque fœtal identifiable », selon l'AP-HP.

Les résultats de l'enquête ont été rendus publics après que la famille eut été informée. Le père du bébé avait mis en cause la maternité et un service « débordé ». Les syndicats avaient critiqué le manque d'effectifs et les conditions de travail dans les maternités de l'AP-HP. Conformément à la demande de la ministre de la Santé Marisol Touraine le rapport d'enquête a été remis aux parents par le professeur Carbonne qui s'est entretenu avec eux.

Une mauvaise communication

A l'issue de cette entrevue « nous n'avons pas eu le sentiment qu'ils étaient complètement opposés aux conclusions de notre rapport », a déclaré à l'AFP le professeur Carbonne, tout en reconnaissant une mauvaise communication entre le personnel et ce couple.
« Dans l'ensemble de cette affaire, manifestement il y a eu une incompréhension [...] et peut-être une perte de confiance dans l'équipe » qui suivait la patiente, a-t-il poursuivi. « La maternité de Port- Royal [...] a une compétence reconnue pour les grossesses à hauts risques, mais il y a probablement des efforts à faire dans la prise en charge des grossesses dites à bas risques », a-t-il convenu.
Selon lui, la grossesse de cette patiente, même s'il y a eu mort foetale, appartenait à cette catégorie.

« Il y a entre 2 et 4 morts foetales pour 1.000 naissances dans le dernier trimestre de la grossesse [...] en Europe, et on sait que pour environ 30% de ces cas, il n'y a aucune cause retrouvée même après autopsie ou examen du placenta », a-t-il expliqué.
Dans cette affaire une enquête judiciaire est toujours en cours. Une autopsie du bébé a été pratiquée mais les médecins de Port- Royal n'en connaissent pas le résultat. L'AP-HP a refusé d'indiquer si l'équipe médicale ayant pris en charge la patiente avait déjà été interrogée par les enquêteurs. 

> S. L. (avec AFP)

Source : lequotidiendumedecin.fr