En juin 2021, la société Philips alertait quant à un possible problème de sécurité sur certains de ses ventilateurs et appareils de PPC et s’engageait à remplacer les appareils concernés. Plus de six mois plus tard Philips tarde à tenir ses engagements, constate l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) qui a fait part mardi, lors d'une conférence de presse, de sa volonté d’utiliser la manière forte pour contraindre l’industriel à accélérer la cadence. Tout en rassurant sur les risques éventuels.
Plus de 370 000 patients potentiellement concernés
Les respirateurs de Philips incriminés sont essentiellement utilisés en ambulatoire. Il s’agit soit de ventilateurs avec ou sans support de vie soit d’appareils de PPC, qui équipent au total en France plus de 370 000 patients. Le problème pointé en juin concerne la mousse insonorisante présente dans ces dispositifs médicaux. Philips évoquait notamment un risque d’exposition à des particules issues de la dégradation de ce matériau. Avec à la clef, selon l’industriel, un risque d’irritation (peau, yeux et voies respiratoires), de réaction inflammatoire, de maux de tête, d’asthme, mais aussi un risque cancérogène potentiel.
Dans ce contexte, Philips a annoncé le rappel mondial de tous les appareils concernés, soit ceux fabriqués avant le 26 avril 2021, estimant pouvoir « fournir 50 % du parc des dispositifs concernés à la fin du premier trimestre 2022, 75 % à mi-2022 et 100 % fin 2022 ».
Seulement 7 % des appareils défectueux remplacés
Mais « à plus de 6 mois de cette alerte, force est de constater qu’on est loin de ce qu’on pourrait souhaiter en termes de dynamique de remplacement » a déploré Caroline Semaille, directrice adjointe de l’ANSM, lors de la conférence de presse. Au 4 février 2022, seulement 7 % des appareils de PPC défectueux avaient en effet été remplacés.
Pour accélérer le mouvement et contraindre Philips « à respecter ses engagements » l’ANSM devrait prendre dans les jours qui viennent une décision de police sanitaire à l’encontre du fabricant. Concrètement, cela veut dire que Philips s'exposera à des poursuites pénales s'il ne respecte pas le calendrier imposé par l'autorité. Celle-ci exige notamment que le groupe ait remplacé 75 % des appareils d'ici à fin juin et améliore sa communication envers les personnes concernées. L'agence lui demande aussi de lancer une étude pour évaluer précisément les risques, en particulier ceux de cancer.
Un risque cancérigène potentiel mais non avéré
Car pour le moment, le risque cancérogène « n’est pas un risque avéré mais seulement un risque potentiel » insiste Caroline Semailles. Les données toxicologiques fournies en décembre par Philips et des données issues d’une cohorte canadienne de patients atteints d’apnée du sommeil seraient même plutôt rassurantes. Cependant « le risque cancérogène après une exposition à long terme des dispositifs concernés ne peut être exclu », estime l'ANSM qui compte réunir un comité d’experts pour évaluer en particulier cette question. « En parallèle, nous évaluons la possibilité de lancer une étude épidémiologique indépendante à partir des données collectées par les prestataires de santé à domicile et celles du Système national des données de santé (SNDS) ».
Ne pas interrompre le traitement
En attendant d’y voir plus clair l’agence appelle à ne pas interrompre le traitement, « quel que soit le type d’appareil utilisé ». Car si le potentiel cancérigène de ces dispositifs n’est pas certain, l’arrêt du traitement présente en revanche « un risque avéré à court terme, par exemple une aggravation de l’insuffisance respiratoire ». Concernant les appareils de PPC, l’agence précise qu’il n’est pas préconisé d’utiliser un filtre. « Des tests préliminaires montrent une diminution de l’efficacité de l’appareil et peuvent entraîner des difficultés respiratoires ».
L'ANSM invite par ailleurs à déclarer tout cas d’effets indésirables (céphalées, irritations, réactions inflammatoires, toux, pression thoracique, asthme, infection des sinus, etc.).
En France, 313 déclarations de matériovigilance ont été enregistrées entre juin et décembre 2021. « Les effets rapportés concernaient majoritairement des céphalées, de la toux, des irritations et des gênes respiratoires », résume l’ANSM. Cependant, 5 cas de cancer ont aussi été signalés, même s’il semble encore trop tôt pour conclure à un lien avec les dispositifs médicaux.
À noter enfin que la mousse incriminée n’est utilisée par aucun autre fabricant de respirateurs.
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