Mise en place chez les femmes pour réaliser un bilan de santé, un rattrapage vaccinal ou un dépistage de pathologies infectieuses et cardio-métaboliques, la consultation prénatale pourrait aussi bénéficier aux hommes, d’autant plus s’ils sont précaires, éloignés des soins et/ou immigrés. C’est ce que montrent les résultats d’une expérimentation, menée en 2021 et 2022 à l’hôpital de Montreuil, deuxième ville de Seine-Saint-Denis, département aux taux d’immigration et de pauvreté les plus élevés de France métropolitaine.
L’expérimentation, baptisée Partage (pour prévention, accès aux soins, rattrapage vaccinal, traitement des affections pendant la grossesse et pour l’enfant), est détaillée dans le dernier Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) de Santé publique France, publié ce 13 mai.
Au total, 1 347 pères (âgés en médiane de 35 ans ; 63 % d’immigrés) ont été inclus. Parmi ces hommes, 27 % n’avaient pas de médecin traitant et déclaraient n’être jamais ou presque jamais en contact avec le système de santé ; 37 % n’avaient jamais fait de dépistage du VIH (43 % des immigrés et 29 % des participants nés en France) ; 67 % des participants avaient une indication au vaccin diphtérie-tétanos-poliomyélite-coqueluche (dTPc) et 28 % au vaccin rougeole-oreillons-rubéole (ROR).
Une expérimentation qui a atteint sa cible
Globalement, la consultation a été « bien acceptée » et « les pères socialement défavorisés s’en sont particulièrement saisis », est-il relevé. Parmi les participants, 18 % ont ainsi bénéficié d’un diagnostic (majoritairement des hépatites B chroniques, des pathologies cardio-métaboliques et des affections dermatologiques) ou d’une remise en soins, 17 % ont été adressés à un professionnel de santé et 11 % orientés vers un accompagnement social. La quasi-totalité (98,8 %) a accepté le dépistage du VIH. Aucune infection n’a été découverte.
La consultation a permis d’identifier un large retard vaccinal, en particulier contre la coqueluche (68 % n’étaient pas à jour) et contre la rougeole (29 %). Alors qu’un stock de vaccins était à disposition pour l’expérimentation, 44 % des participants ont bénéficié d’un rattrapage sur place (60 % de ceux avec un retard).
Le facteur le plus fortement associé aux indicateurs d’impact était l’absence de couverture maladie : « parmi les participants sans droits à l’assurance maladie, 41 % ont eu un diagnostic médical, 41 % ont été adressés à un soignant, 72 % à un travailleur social et 73 % ont reçu une ou plusieurs mises à jour vaccinales », est-il détaillé.
Cette consultation a donc « une utilité de santé publique » et contribue à réduire les inégalités sociales de santé, jugent les auteurs. Son succès était « fondé sur la démarche proactive des sages-femmes de recherche, qui ont appelé un à un tous les hommes éligibles », est-il précisé. La question de la réplicabilité est posée : le passage à l’échelle de cette consultation implique de régler les questions de l’identification des futurs pères et du financement d’un paquet de soins (consultation complexe, bilan biologique, vaccins, insertion dans un parcours de soins d’aval), soulignent les auteurs. Un déploiement est actuellement évalué à l’échelle de la ville de Montreuil (étude Partage 2).
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