Entre 1989 et 2018, la survie des personnes atteintes de cancer en France métropolitaine s’est sensiblement améliorée pour la « grande majorité » des localisations tumorales. C’est ce que confirment les estimations actualisées de survie à 1 an, 5 ans, 10 ans et même – indicateur nouveau – 20 ans, que viennent de publier Santé publique France (SPF), l’INCa, le service de biostatistique des Hospices Civils de Lyon et le réseau Francim des registres des cancers.
En pratique, les données de 23 registres couvrant 25 départements, soit 22 % de la population française ont été analysées. Les auteurs se sont penchés sur plus de 730 000 cas de cancers solides et hémopathies malignes de 73 localisations ou types différents (dont une vingtaine n’avait encore jamais été incluse dans les études de suivi de la survie) diagnostiqués entre 1989 et 2015 chez des personnes de plus de 15 ans. « Une actualisation du statut vital a été réalisée au 30 juin 2018 », précisait ce matin lors d’une conférence de presse le Dr Gaëlle Coureau du réseau Francim.
Amélioration de la survie à 5 ans pour les cancers les plus fréquents
« Ces nouveaux résultats montrent une amélioration globale des pronostics dans la quasi-totalité des localisations cancéreuses », résume Santé Publique France.
La tendance est particulièrement nette pour les hémopathies malignes. Sur les 18 sous-types étudiés, 10 ont en effet vu leur pronostic s’améliorer significativement, à l’instar de la leucémie myéloïde chronique (augmentation de la survie de près de 40 points entre 1990 et 2015), du lymphome folliculaire (+ 25 points en 25 ans), du lymphome diffus à grandes cellules B (+ 24 points) et du myélome multiple (+ 21 points). Si bien qu’en 2018, dix hémopathies malignes voyaient leur survie nette à 5 ans dépasser 80 %.
Mais les tumeurs solides sont également concernées. De fait, parmi les 41 localisations de tumeurs solides étudiées, 35 ont vu leur pronostic s’améliorer. Une évolution particulièrement marquée, depuis les années 1990, pour une dizaine de cancers tels que ceux de la thyroïde, de l’ovaire, ou de l’intestin grêle (+ 14 points de pourcentage) mais aussi de la prostate (+ 21 points), du sein (+ 9 points), colo-rectal (+ 12 points), et même du poumon (+ 11 points).
Pour expliquer ce phénomène, diverses hypothèses sont avancées. À commencer par des progrès réalisés dans le domaine du diagnostic précoce – « notamment grâce aux pratiques de dépistage, bien qu’il soit difficile d’en quantifier l’apport », précise SPF, mais aussi grâce à l’amélioration des outils diagnostiques. Mais des avancées thérapeutiques comme les thérapies ciblées, les combinaisons thérapeutiques ou les hormonothérapies, ou encore la surveillance accrue des patients « notamment en oncogériatrie et grâce aux réunions de concertation pluridisciplinaire » entreraient aussi en ligne de compte.
La survie encore dépendante du sexe et de l’âge
Cependant, le rapport suggère que ces progrès apparaissent encore trop dépendants de facteurs tels que l’âge, et ce en particulier pour les cancers solides. Conséquence : le pronostic de nombreux cancers continue de varier avec les années, et ce au détriment des patients les plus âgés. Un constat probablement du, comme le rapporte le Dr Coureau, à un diagnostic plus tardif chez les personnes âgées et aux comorbidités associées à l’âge, qui contre-indiquent les traitements les plus agressifs mais aussi les plus efficaces.
Autre facteur de variation de la survie : le sexe, souvent avancé comme déterminant de la sensibilisation au dépistage ou à l’exposition à certaines conduites à risque (consommation de tabac et d’alcool). « Que ce soit pour les tumeurs solides ou les hémopathies malignes, l’étude montre des différences de survie en fonction du sexe en faveur des femmes pour la quasi-totalité des cancers étudiés ».
Pas assez de progrès du côté des cancers de mauvais pronostic
Autre bémol : « certains cancers de mauvais pronostic conservent des survies à 5 ans basses, chez l’homme et la femme », déplore Santé Publique France. Ainsi, « les cancers de pronostic défavorable représentent [encore] entre [20 et 30 %] des cancers, parmi lesquels le cancer du poumon (survie inférieure à 25 % à 5 ans) », indique le Gaëlle Coureau. Des observations d'ailleurs déjà formulées en novembre par l’INCa après de premières analyses.
La survie associée à quelques cancers aurait même diminué, à l’instar du cancer de la vessie chez la femme et de la thrombocytémie essentielle chez les plus de 60 ans. Cette évolution pourrait toutefois être due à des évolutions des critères de diagnostic de ces cancers.
En outre, si pour la plupart des cancers et hémopathies de pronostic favorable à 5 ans, « on observe à 20 ans une survie nette relativement stable quel que soit l’âge », ce n’est pas le cas de tous les cancers de pronostic intermédiaire. Certains enregistreraient en effet « un recul important de la survie nette entre 5 et 20 ans », comme les cancers de la sphère ORL (- 25 à - 30 points) – et en particulier ceux des lèvres-bouche-pharynx (survie nette à 20 ans de 10 % contre 44 % à 5 ans).
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