Vaccin contre le Covid-19 : malgré la multiplication des annonces, la prudence reste de mise

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Publié le 17/11/2020
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Illustration sur la vaccination contre les coronavirus.

Illustration sur la vaccination contre les coronavirus.
Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Si novembre 2020 est en France marqué par le reconfinement de la population, il constitue sans doute, à l’échelle mondiale, le mois de l’accélération de la course au vaccin. Alors que la seconde vague de Covid-19 semble lentement maîtrisée, les annonces se multiplient.

Des annonces de laboratoires d’abord, dont trois, Pfizer et BioNTech dès le 9 novembre, suivis par l’Institut russe Gamaleïa deux jours plus tard et par l’américain Moderna ce lundi, ont affirmé que leur vaccin – à ARNm pour Pfizer et Moderna, et basé sur un vecteur viral pour Gamaleïa – présentait une efficacité supérieure à 90 %. A noter que le dernier communiqué, celui de Moderna, affiche une efficacité de 94,5 % (sur 95 cas de Covid, seuls 5 auraient été observés dans le groupe interventionnel de l’essai clinique, dont aucun grave) et un profil d’innocuité satisfaisant, marqué par aucun effet indésirable autre que ceux accompagnants classiquement les vaccinations (maux de tête, arthralgie, myalgie, douleurs ou rougeurs au point d’injection, etc.).

Se sont ajoutées des annonces d’autorités sanitaires internationales, à l’instar de l’Agence européenne du médicament (EMA), dont le directeur aurait révélé samedi, au média italien Il Sole 24 Ore, pouvoir fournir un avis favorable à la validation d’un premier vaccin « d’ici à la fin de l’année », pour une distribution début janvier. Dans la continuité de cette affirmation de l’EMA, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a d’ailleurs assuré que la France se mettait « dans les starting-blocks pour être prêt pour distribuer un vaccin contre le Covid-19 » dès janvier au moyen d’un budget de 1,5 milliard d'euros si toutefois un vaccin était validé.

Cependant, parmi toutes ces déclarations, une pointe plus clairement la nécessité de ne se montrer que « prudemment optimiste ». De retour au siège de l’OMS après un isolement, Tedros Adhanom Ghebreyesus, le Directeur de l’agence a en effet mis en garde lundi, suite en particulier aux annonces de Moderna, contre toute « complaisance ». Si, près d’un an après l’émergence du SARS-CoV-2, l’enthousiasme est permis et l’anticipation nécessaire, la prudence doit elle aussi rester de mise.

Des résultats plus complets restent attendus

En effet, la plupart des annonces ne reposent pour le moment pas sur des études validées par les comités de relecture de grandes revues scientifiques mais sur des communiqués de presse publiés directement par les laboratoires. Par ailleurs, ces communiqués n’évoquent que des résultats préliminaires d’essais de phase 3 recueillis auprès d'un nombre relativement faible de volontaires. Ainsi, même si Moderna semble avoir fourni davantage de données que ses deux concurrents, « il faut voir les détails complets dans une publication scientifique pour être en mesure de se prononcer sur ces résultats de façon indépendante », souligne le Dr Penny Ward, citée par l'organisme britannique indépendant Science Media Centre. A noter que ces données cliniques doivent par ailleurs être transmises pour évaluation par les industriels aux autorités sanitaires habilitées à autoriser la mise sur le marché des vaccins.

Dans tous les cas, parmi les informations qui doivent être précisées pour évaluer l’intérêt des vaccins, l’Académie nationale de médecine évoque notamment l’efficacité clinique en termes de « morbidité et de mortalité » ainsi que l’innocuité des vaccins également chez les personnes âgées et atteintes de comorbidités, « qui devraient être considérées comme prioritaire », la durée de la protection et les contraintes logistiques liées à la thermostabilité des vaccins.

Des procédures accélérées d’évaluation

A noter cependant que si chaque vaccin doit passer par une procédure d’évaluation avant de voir son utilisation autorisée, ces processus, pendant la crise sanitaire et à l’instar des étapes de développement, sont accélérés. Ainsi, afin de rendre ses avis au plus vite, l’EMA examinerait les données de sécurité et d’efficacité des vaccins au fil de leur parution, avant même toute demande formelle émanant des fabricants. La Food and Drug Administration (FDA) américaine disposerait par ailleurs elle aussi de procédures d’autorisation d’utilisation d’urgence (EUA), de même que l’OMS, qui aurait déjà été sollicitée par Gamaleïa pour son vaccin Spoutnik V

I.L. avec AFP


Source : lequotidiendumedecin.fr