Le constat des rapporteurs des Académies de médecine et pharmacie Patrick Netter et Arnold Migus* sur l'état de la recherche en France est sévère. Il avait été publié fin 2019, mais la pandémie est venue bousculer le calendrier. Rappel des chiffres : il existe un recul constant de la France en biologie-santé dans le domaine de la recherche médicale mais aussi dans l’innovation. En termes de production de publication, la France est passée de la 5e place en 2000 à la 6e en 2010 et à la 10e depuis 2019. Dans l’innovation en biotechnologies, la recherche française se trouve maintenant à la 17e position. Pis, il existe « de nombreuses sources de financement qui n’assurent ni cohérence ni budget adapté » dont la Mires, les programmes d’investissement d’avenir, les PHRC, les Merri... Concernant les investissements, le budget en biologie-santé en euros constants de la Mires a baissé de 22 % en onze ans. Il ne constitue plus que 17,2 % du budget de la Mires. « Nous sommes à un chiffre bas par rapport à nos voisins européens qui sont plus près de 30 % », commente Patrick Netter. Qui recommande de faire passer cette part de 17,2 % à 30-50 %, soit la part attribuée aux principaux pays européens.
Des Merri peu incitatives
Quant au financement de la recherche hospitalière par le ministère des Solidarités et de la Santé, il est constitué des Merri, soit les missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation (financement de la recherche hospitalière) qui bénéficient d’une dotation socle et d’une part variable. Le total équivaut à 1,3 milliard d’euros. « Ces Merri sont actuellement peu incitatives à l’investissement de la recherche par les CHU. » Ces dotations sont déterminées mécaniquement, mais « ne respectent pas les bonnes pratiques internationales et ne permettent pas au ministère de la Santé de déployer une véritable politique de recherche hospitalière », tacle le rapporteur. D'où des recommandations de réforme de ce mécanisme de financement. La reco 2 préconise de réformer la subvention aux structures hospitalières des moyens de la recherche clinique qui proviennent de l’assurance maladie, dite dotation socle des Merri, soit 1,37 milliard d’euros de crédit en incluant les PHRC. Selon la reco 3, il faudrait confier l’évaluation des crédits Merri socle et PHRC à un nouveau Conseil d’orientation de la recherche hospitalière qui serait placé sous l’égide du ministère des Solidarités et de la Santé. L’objectif de cet organisme serait une meilleure articulation entre la recherche et la santé. En complément de cette mesure serait supprimée la procédure actuelle qui repose sur l’application mécanique d'indicateurs. Reco N° 4, les rapporteurs souhaitent que soit versé aux structures hospitalières un préciput aligné sur celui à venir de l’ANR, soit 40 % des crédits alloués aux équipes et laboratoires qu’elles hébergent.
Une gouvernance élargie à l'hôpital
Enfin, concernant le manque de coordination des différents organismes de recherche, d'autres préconisations liées à l'organisation sont présentées. La reco 5 consiste à inclure le nouveau Conseil d’orientation de la recherche hospitalière au dispositif du ministère de la recherche sur la biologie-santé. Par ailleurs, il serait nécessaire de simplifier le dispositif des représentations scientifiques françaises en les regroupant en un dispositif de guichet unique à Bruxelles. Sur l'hôpital, les rapporteurs recommandent de faire entrer dans les directoires des CHU des composantes universitaires et scientifiques. Enfin, mesure qui était passée à la trappe dans la discussion parlementaire, il s'agirait d'identifier un nombre limité de pôles de recherche hospitalo-universitaires centrés sur des CHU disposant d’une visibilité de recherche internationale en leur confiant une responsabilité de tête de réseau régional.
* Jeudi 24 juin 2021, audition publique sur le financement et l’organisation de la recherche en biologie-santé menée par l'OPECST.
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