La nomination de Dominique Le Guludec à la tête de la Haute Autorité de santé (HAS) a été vécue comme une espèce d’effraction par les membres du club. Lorsque l’on brigue le poste le plus en vue de la République hippocratique, l’impétrant doit avoir en première instance été adoubé par le microcosme politico-médiatique. Agnès Buzyn que l’on n’attendait pas davantage avenue-Duquesne avait pourtant rappelé les règles simples de ce petit jeu des nominations. Le fait du prince s’impose à tous, non pas parce qu’il repose sur le bon plaisir mais parce qu’il répond à un strict cahier des charges, à savoir le bilan de compétences. A ce titre, Dominique Le Guludec coche toute les cases. PU-PH*, elle a déjà occupé des fonctions administratives à l’Institut de radioprotection et de sureté nucléaire (IRSN) où la gestion de crises s’avère essentielle. Le parcours médical est également sans faute, depuis la chefferie de service en médecine nucléaire jusqu’à la présidence de la commission médicale d’établissement des HUPNVS (Hôpitaux universitaires Paris Nord Val de Seine). Mais la légitimité de la première de la classe suffit-elle pour incarner la médecine française face au politique ? Au moment où le système de soins doit opérer sa révolution, « l’élastique risque de se rompre à chaque instant », pronostique la présidente de la HAS. Alors pour conduire le changement, les origines, l’héritage qui ont nourri le parcours brillant comptent autant sinon plus que cette force de conviction évidente qui se dégage après cinq minutes d’entretien ou le refus de la langue de bois. Ici le « j’étais une battante mais aussi une combattante » ne relève pas d’une stratégie de com mais bien de l’histoire personnelle. Celle du moment où l’on choisit ses modèles d’identification pour la vie. Grandir avec les morts de l’Histoire, comme ce grand-père paternel, héros de la résistance, déporté politique et mort dans les camps et tous ceux du côté maternel exterminés parce que d’origine juive. Au-delà du devoir de mémoire, la première obligation « était alors de ne pas avoir de problèmes ». Cette première mission réussie a donné des ailes à cette jeune fille qui faute d’avoir eu 20 ans en 68 attend la révolution grâce aux promesses du programme commun PS-PC des années soixante-dix. La perte des illusions n’effacera jamais l’inscription à gauche et la fierté d’une carrière qui s’est déroulée dans le giron du service public.
Aujourd’hui, la présidente de la HAS n’ignore rien des attentes de ses anciens collègues, ni de la crise qui mine au quotidien l’institution hospitalière ou la médecine libérale. La médecine nucléaire lui aura toutefois appris l’essentiel face à l’exigence d’action. Concentrer le tir sur les zones tumorales, épargner les tissus sains sans dommage collatéral, bref un modèle idéal pour tout nouvel impétrant dans le monde politique.
*Professeur des universités-praticien hospitalier.
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