Alors qu’une épidémie d’infections invasives à méningocoque sévit depuis fin octobre sur le campus universitaire de Dijon, avec déjà trois cas dont deux mortels, un autre cas de méningite létale est survenu jeudi dernier à Montélimar.
Faut-il pour autant s’inquiéter et craindre une résurgence de la maladie ? Globalement en France, « le nombre de méningites bactériennes a plutôt reculé ces dernières années » rassure Daniel Levy-Bruhl, épidémiologiste de Santé Publique France. Avec notamment une quasi-disparition des méningites à Hæmophilus influenzae depuis l’introduction de la vaccination dans les années quatre-vingt-dix et une diminution de 50 % des méningites à pneumocoque depuis l’introduction du vaccin antipneumococcique conjugué 13 valences en 2010.
Le bilan est moins glorieux concernant les infections invasives à méningocoques (IMM). Car si les IMM de type B ont plutôt marqué le pas ces dernières années, celles à méningocoques C ne reculent pas malgré la généralisation de la vaccination aux sujets de 1 à 24 ans en 2010, faute notamment d’une couverture vaccinale suffisante. Surtout, « depuis 2015, on observe en France une augmentation des infections invasives à méningocoque du sérogroupe W » signalait fin décembre Santé Publique France.
Méningocoque W 135 : une létalité 2 fois plus élevée
Classiquement très rare, ce sérogroupe -qui est d’ailleurs celui impliqué dans l’épidémie de Dijon- serait désormais retrouvé dans près de 7 % à 8 % des IMM. « De 11 cas rapportés en 2010, on est passé à 32 cas recensés en 2015 » précise Daniel Levy-Bruhl, avec l’émergence de souches de type W 135 identiques à celle observées en Amérique du Sud et au Royaume-Uni.
Or « ce nouveau clone est hyperinvasif » avec une virulence bien plus importante que celle d’autres méningocoques et une létalité presque 2 fois plus élevée que ce qu’on observe normalement avec le méningocoque.
Par ailleurs, si ce clone n’est pas en soi plus transmissible que les autres, « le fait qu’il soit nouveau fait que la population y est plus réceptive, faute d’y être immunisée ».
Des signes cliniques parfois atypiques
Autre spécificité de ce méningocoque W 135 : sa propension à donner des tableaux cliniques atypiques. « Les Anglais ont bien montré que ce clone pouvait donner davantage de formes bactériémiques que les clones classiques (environ 50 % dans les séries publiées) mais aussi des pneumonies, des arthrites voir des infections purement gastro-intestinales ». Un des trois cas de Dijon s’est d’ailleurs manifesté sous forme d’arthrite. « Cela rend les choses plus compliquées avec bien sûr un risque de retard au diagnostic » poursuit l’épidémiologiste.
Enfin, alors que classiquement les clones émergents à l’origine d’épidémies ou d’endémies sévissent localement puis disparaissent (comme le clone « Normand » par exemple), cette souche W 135 « a non seulement donné une manifestation de type épidémique en Bourgogne mais elle est aussi responsable de cas sporadiques un peu partout en France, précise Daniel Levy-Bruhl. C’est donc un clone qui s’est installé et on s’attend à voir des nouveaux cas dans d’autres régions françaises ».
Jusqu’où poursuivra-t-il son expansion ? « Personne ne peut répondre pour le moment, indique Daniel Levy-Bruhl, tout en s’avouant préoccupé. Le clone peut disparaître rapidement comme il peut continuer dans sa diffusion ». L’expérience anglaise n’est pas forcément rassurante, puisque Outre manche, cette nouvelle souche poursuit son expansion, contribuant désormais à près de 25 % des IMM.
Dans ce contexte, les autorités sanitaires françaises sont sur le pied de guerre. « On surveille de très près ce nouveau clone non seulement en Bourgogne mais aussi dans toute la France ». Par ailleurs une campagne de vaccination de grande ampleur vient d’être lancée en Bourgogne sur le campus de l'université de Dijon et devrait concerner pas moins de 30 000 personnes.
Pour lutter contre ce nouveau méningocoque, on dispose en effet de deux vaccins tétravalents qui ciblent les sérogroupes A, C, Y et W. Ces vaccins sont administrés selon un schéma à une seule dose et l’immunité est acquise 10 jours après la vaccination.
Reste que pour le moment « le nombre de cas reste extrêmement faible et ne justifie pas une vaccination systématique », selon l'épidémiologiste.
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