Dépistage du cancer du col utérin : en pratique comment se fera le test HPV selon les nouvelles recos de la HAS ?

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Publié le 17/07/2019
HPV

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Crédit photo : SPL/PHANIE

Alors que le dépistage organisé du cancer du col utérin est à peine lancé sur l'ensemble du territoire, la Haute Autorité de Santé (HAS) a annoncé la semaine dernière qu'elle demandait déjà d'en changer les règles. En effet, l'Agence recommande qu'un dépistage systématique par un test HPV soit désormais effectué en première intention chez les femmes à partir de 30 ans. Nous revenons sur cette décision de la HAS avec le Dr Christine Bergeron (photo), anatomocytopathologiste et vice-présidente de la Société française de colposcopie et de pathologie cervico-vaginale (SFCPCV), que Le Généraliste a interviewé.

Cette recommandation de la HAS signifie-t-elle que l'analyse des cellules par frottis est obsolète ?

Dr Christine Bergeron : Non pas du tout ! À partir de 25 ans, chez les jeunes femmes asymptomatiques le frottis classique avec examen cytologique reste la règle en première intention : un examen cytologique à 1 an d'intervalle, puis 3 ans si le résultat des deux premiers frottis est normal. La HAS recommande de changer de stratégie à partir de 30 ans, le test HPV remplaçant alors l'examen cytologique. Et si le test HPV est négatif, l'Agence propose qu'un autre dépistage par ce test soit désormais effectué tous les 5 ans jusqu'à 65 ans. En revanche, en cas de test est positif, une analyse cytologique doit être effectuée. Toutes les démarches à suivre sont détaillées de façon simple selon un algorithme précis. En fait, on reprend les choses dans le bon ordre, en recherchant d'abord s'il y a une infection, puis on analyse les conséquences de cette éventuelle infection par HPV.

Pour les généralistes, le geste du prélèvement reste-t-il identique ?

Dr C.B : Oui, le geste de prélèvement reste le même au niveau du col. L'analyse en laboratoire en revanche est différente. Dans un premier temps, on recherche l'ADN du virus, et s'il s'avère présent une analyse cytologique est pratiquée. Pour ce faire un prélèvement en phase liquide est indispensable. Le prélèvement sur lame doit être abandonné.

Pourquoi la SFCPCV insiste-t-elle sur la nécessité d'une bonne information des médecins comme des femmes ?

Dr C.B. : La SFCPCV insiste en effet sur cette information et rappelle l'importance de respecter cet algorithme, c'est-à-dire le bon ordre des différentes étapes à effectuer. Car le risque serait alors la multiplication des traitements inutiles, comme celui d'une infection sans lésion induisant des sténoses du col et des complications pendant la grossesse, une anxiété des femmes jeunes qui ont des infections transitoires qui régressent spontanément dans 80 % des cas. Depuis longtemps, la SFCPCV lutte contre les surtraitements qui peuvent être graves de conséquences chez des femmes en âge d'avoir des enfants. Si l'utilisation du test HPV pour le dépistage est plus performante, il faut dans le même temps éviter de s'engager vers des mauvaises indications thérapeutiques. 

On peut s'attendre à ce qu'il y ait plus de colposcopies réalisées ?

Dr C.B. : Oui ! Et en voici la raison. De façon approximative, on peut s'attendre à la découverte de 10 % de tests positifs HPV. Sur ceux-là, 30 % auront une cytologie positive (ASC-US ou avec des anomalies plus graves) nécessitant une colposcopie. Mais toutes les femmes qui ont eu un test HPV positif la première fois et avec une cytologie négative, doivent un an plus tard refaire un test HPV. Si le résultat est positif (chez environ 50 % de ces femmes), elles devront d'emblée faire une colposcopie. Au total, cela nécessite que les gynécologues soient bien formés à la colposcopie.

Quand cette recommandation de la HAS va-t-elle devenir effective ?

Dr C.B. : Certains points pratiques doivent être réglés. Les tests HPV vont sans doute être analysés au niveau régional en suivant la même échelle que les centres régionaux de gestion du dépistage. Il faut également une intervention de l'Assurance maladie pour que l'indication du test HPV en dépistage primaire soit côté. Et mettre en place la gratuité de ce test dans le cadre du dépistage. Au final, il faudra attendre au moins un an avant que tout se mette en place.

D'autres pays ont-ils adopté une stratégie semblable ?

Dr C.B : L'Italie a le même schéma déjà mis en place depuis presque 5 ans. Aux Pays-Bas, le dépistage organisé du cancer du col utérin ne commence qu'à 30 ans. Le test HPV est effectué en première intention. Cela a commencé en 2019. 


Source : lequotidiendumedecin.fr